
La souveraineté nationale repose avant tout sur la capacité d’un État à contrôler ses frontières, à garantir l’intégrité de son territoire et à protéger sa population contre toute menace extérieure. Aujourd’hui, la Mauritanie fait face à une pression grandissante sur ses frontières, notamment celles qu’elle partage avec le Sénégal et le Mali, où se multiplient trafics illicites, infiltrations criminelles, activités terroristes et exploitation incontrôlée des ressources naturelles. Face à cette réalité, le statu quo n’est plus une option : il est impératif d’adopter une approche moderne et efficace en mettant en place un système de surveillance avancé, capable de répondre aux défis sécuritaires du XXIᵉ siècle.
L’heure est grave. Le Sahel, dans son ensemble, est devenu une zone d’instabilité chronique, où les groupes terroristes cherchent à exploiter les failles sécuritaires pour s’implanter et se renforcer. La Mauritanie, jusque-là relativement préservée, ne peut se permettre de laisser des brèches ouvertes sur ses frontières, au risque de voir sa sécurité compromise. Les incursions terroristes qui ont frappé certains pays voisins rappellent avec violence que l’absence de contrôle rigoureux aux frontières est une invitation à l’infiltration. Dans ce contexte, le vide sécuritaire est un luxe que nous ne pouvons plus nous offrir.
Par ailleurs, l’intensification des trafics transfrontaliers – armes, drogue, contrebande en tout genre – met à mal l’autorité de l’État et alimente des réseaux criminels qui prospèrent sur l’absence de surveillance efficace. Ces trafiquants, organisés et bien équipés, profitent de la porosité de nos frontières pour développer leurs activités en toute impunité, mettant en péril l’économie nationale et la stabilité du pays. Seule une réponse technologique et stratégique permettra d’inverser cette tendance.
Un autre phénomène inquiétant est la ruée massive vers l’orpaillage, qui attire des milliers d’étrangers, particulièrement aux confins nord du pays. Des groupes entiers franchissent nos frontières en quête de fortune, sans aucun contrôle, modifiant ainsi la dynamique démographique des zones frontalières et créant des tensions croissantes. Outre la concurrence déloyale qu’ils imposent aux orpailleurs nationaux, cette vague incontrôlée représente un risque sécuritaire majeur, avec la présence possible d’individus aux intentions douteuses. Ces flux humains anarchiques rendent d’autant plus cruciale la mise en place d’un dispositif de surveillance sophistiqué, capable de détecter et de réguler les mouvements transfrontaliers.
Parallèlement, la Mauritanie est confrontée à une forte affluence d’immigrés de diverses origines, cherchant à traverser ou s’installer sur notre territoire. Cette situation est exacerbée par l’accord récent entre notre pays et l’Union européenne, visant à renforcer la coopération en matière de gestion migratoire. Cet accord, signé en mars 2024, prévoit une enveloppe de 210 millions d’euros pour aider la Mauritanie à réduire le nombre de migrants transitant par son territoire en direction de l’Europe . Toutefois, il suscite une vive polémique au sein de l’opinion nationale, certains y voyant une tentative de faire de notre pays une zone tampon pour l’accueil de réfugiés, au détriment de nos intérêts souverains . Cette perspective alimente les craintes d’une pression migratoire accrue et d’une déstabilisation sociale, rendant encore plus urgente la nécessité d’un contrôle efficace de nos frontières.
La question qui se pose désormais est la suivante : comment répondre à ces défis avec efficacité et pragmatisme ? La réponse réside dans une modernisation radicale de notre système de contrôle des frontières. Les méthodes classiques de surveillance ont montré leurs limites, notamment face à l’immensité du territoire à sécuriser et à la mobilité des menaces. Aujourd’hui, l’ère technologique offre des solutions inédites qui, bien intégrées, permettront à la Mauritanie de prendre une longueur d’avance dans la protection de son espace national.
L’adoption d’un système de surveillance avancé, combinant drones de surveillance, radars longue portée, satellites d’observation, capteurs thermiques et bases avancées de sécurité, est désormais une nécessité stratégique. Ce dispositif devra être piloté par l’Armée nationale, en particulier l’Armée de l’Air, qui dispose de l’expertise et des compétences requises pour gérer les équipements sophistiqués et coordonner les interventions en temps réel. Une telle approche garantirait une couverture permanente et une réaction rapide en cas d’intrusion ou d’incident.
Bien entendu, un tel projet implique un investissement conséquent, quelques centaines de millions d'euros. Mais cette dépense doit être considérée comme un investissement vital plutôt qu’un coût. La sécurité nationale ne peut être compromise pour des raisons budgétaires. De nombreuses pistes de financement existent : appuis internationaux (Union européenne, Nations Unies, États-Unis, France), coopération bilatérale, partenariats avec des firmes technologiques spécialisées et mobilisation de fonds souverains. Avec une volonté politique forte et une stratégie de négociation bien menée, il est possible de mobiliser les ressources nécessaires sans peser excessivement sur le budget de l’État.
Le choix est clair : soit nous agissons maintenant en dotant notre pays d’un dispositif de surveillance performant, soit nous nous exposons à un avenir incertain, où les menaces extérieures finiront par s’imposer à nous avec des conséquences irréversibles. La Mauritanie a toujours su anticiper et se prémunir contre les dangers qui guettent la région. Il est temps de faire preuve de cette même vision et de cette même détermination pour la protection de nos frontières.
La quiétude nationale ne peut plus être un vœu pieux ; elle doit être garantie par des moyens concrets, modernes et adaptés aux défis d’aujourd’hui. L’histoire nous enseigne que les nations qui négligent leur sécurité finissent toujours par en payer le prix fort. La Mauritanie ne doit pas être de celles-là. Il est urgent d’agir.
Haroun Rabani.
harounrab@gmail.com