
Ce qui devait être une simple visite protocolaire du ministre de la Santé s’est mué en révélateur d’un malaise institutionnel profond. Au cœur de la controverse : la marginalisation publique et politique du maire et député Ghassem Ould Bellali, figure emblématique de la ville.
Une fracture symbolique et politique
Devant les caméras, la scène avait des airs d’unité républicaine : ministre, wali – staff et maire – réunis dans un lieu emblématique. Mais cette façade s’est rapidement fissurée. Le maire, pourtant acteur central de la création de l’établissement en 1997, a été ignoré, relégué au second plan.
Pire, des propos jugés méprisants ont été tenus à son encontre par le Directeur de l’établissement, Mr Salaheddine Ould Bechir, sans que ni le ministre ni le wali ne réagissent. Ce silence a été ressenti comme une humiliation non seulement pour l’homme, mais pour la représentation démocratique locale qu’il incarne.
Un symbole contesté
L’Unité ophtalmologique fait partie intégrante du centre de santé municipal de Rudwan: il représente l’engagement direct de la municipalité envers les citoyens. Pour nombre d’habitants, il est le fruit d’une volonté populaire et d’une gestion de proximité. Or, depuis l’instauration de la Zone Franche, les équilibres institutionnels ont changé.
La mairie a vu ses compétences (et celles de certains départements ministériels relavant de la wilaya), grignotées au profit d’entités technocratiques, opérant souvent sans concertation locale. Une série de décisions opaques – dont l’annulation d’actes fonciers par une chaîne administrative centralisée – illustre cette volonté de déposséder la mairie de ses prérogatives.
La municipale de Nouadhibou, portée par un maire de grande expérience, est pourtant régulièrement citée comme un exemple de décentralisation réussie, susceptible d’inspirer l’ensemble du pays. Des investisseurs étrangers eux-mêmes ont, à plusieurs reprises, salué la stabilité et l’efficacité de cette gestion locale, considérée comme un modèle dans un environnement souvent centralisé.
Une stratégie de discrédit ?
Tous les moyens ont été mobilisés pour tenter de briser l’image et l’influence du maire : campagnes de dénigrement, pressions morales, tentatives d’isolement, marginalisation systématique dans les prises de décision. Lors des dernières élections locales, le parti de la majorité a même dépêché de puissants barons politiques et des hommes d’affaires influents pour arracher la mairie et mettre fin au « règne légendaire » de l’édile. En vain.
El Ghassem Ould Bellali est sorti renforcé des urnes (élu Mairie), porté par une population fidèle à son action.
Un rempart populaire
Face à ces tentatives de marginalisation, la réaction citoyenne a été immédiate. Manifestation de solidarité, déclarations publiques… Une large frange de la population, soutenue par des élus locaux et des figures de la société civile, a rappelé que Nouadhibou ne saurait être dirigée sans sa voix légitime.
Pour ses soutiens, s’attaquer à un Maire dynamique, c’est s’en prendre à la volonté populaire. L’homme qui a redonné d’abord à l’hôtel de ville sa salubrité, ensuite de l’attractivité à une ville oubliée demeure, pour beaucoup, le garant d’un développement local authentique.
Un enjeu national
Ce conflit dépasse le cadre local. Il soulève une question cruciale : peut-on construire une gouvernance stable et légitime en contournant les élus ? À l’heure où la centralisation s’intensifie en Mauritanie, ce cas illustre les risques d’une fracture entre institutions et citoyens. En tentant d’affaiblir un maire, c’est la voix d’un peuple que l’on prend le risque de faire taire.