Les mules bancaires permettent "de faire prospérer des escroqueries de grande ampleur"

jeu, 02/12/2021 - 10:27

Un réseau, soupçonné d'avoir blanchi 16,5 millions d'euros, vient d'être démantelé par la police judiciaire. Ce groupe criminel blanchissait de l'argent issu de deux escroqueries très en vogue : les faux ordres de virement qui visent les entreprises, et les arnaques à l'investissement, un phénomène en hausse qui touche les particuliers.

On connaît le phénomène des mules qui ingèrent de la drogue pour le compte de trafiquants de stupéfiants, mais il existe aussi des mules bancaires, chargées d’ouvrir des comptes en banque et de créer des sociétés-écrans, pour le compte de la grande criminalité financière. Les réseaux utilisent ces mules pour compliquer le travail des enquêteurs, et pour rendre très opaque le circuit qui permet de blanchir de l’argent, fruit de différentes escroqueries.

Dernièrement, un réseau soupçonné d'avoir blanchi 16,5 millions d'euros a été démantelé par la police judiciaire. Un Français d'une quarantaine d'années, installé en Israël, est suspecté d'avoir dirigé ce réseau. En lien avec les autorités locales, il a été interrogé fin novembre par des enquêteurs de l'OCRGDF qui se sont rendus sur place. Une procédure d'extradition doit être lancée en vue de sa mise en examen en France. Ce réseau blanchissait de l'argent issu de deux grandes escroqueries : les faux ordres de virement, et les arnaques à l'investissement.

Les sites d'investissement en ligne font miroiter aux internautes des rendements très prometteurs à condition d'investir dans des vaches laitières, du whisky, des parkings ou encore de la crypto-monnaie. Des propositions d'investissements complètement bidons souligne une enquêtrice. Mais une fois que vous avez investi, impossible de récupérer votre argent.

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Le rôle des mules bancaires

C'est alors que des circuits de blanchiments très complexes sont mis en place. Indispensables pour monter ces escroqueries très lucratives, des mules bancaires se chargent d'ouvrir des comptes et de créer des sociétés écrans. "On pourrait faire un parallèle avec le rôle de guetteur dans le trafic de stupéfiants, parce qu'une mule bancaire, c'est une petite main qui va servir à ouvrir un compte bancaire, explique Anne-Sophie Coulbois, directrice de l'Office central pour la répression de la grande délinquance financière (OCRDFG). Ce sera grâce à ce compte et à la multitude de mules que les groupes criminels organisés peuvent faire prospérer des escroqueries de grande ampleur en minimisant leur risque pénal."

Selon Anne-Sophie Coulbois, ces mules "sont des personnes qui sont souvent dans une situation économique un peu difficile et elles vont être rémunérées quelques centaines voire quelques milliers d'euros pour ouvrir ces comptes bancaires alors que l'escroquerie va rapporter des dizaines de milliers voire des millions d'euros aux escrocs."

"Sans elles, c'est tout le schéma de blanchiment ou tout le schéma d'escroquerie qui tombe à l'eau ou qui en tout cas devient extrêmement plus difficile à mettre en œuvre."

 

Ces mules bancaires pensent souvent ne pas prendre de risque. En réalité, elles peuvent se retrouver complices de blanchiment en bande organisée. "L'utilisation de ces mules bancaires par les réseaux criminels organisés permet de couper les liens entre les flux illégaux et l'escroc ou le blanchisseur, poursuit Anne-Sophie Coulbois. Seule l'identité de la mule bancaire va apparaître, les fonds circulent ensuite vers des comptes d'autres mules bancaires et il est très difficile de remonter vers le donneur d'ordre final."

Ce recours aux mules bancaires compliquent le travail des enquêteurs, des mules qui se spécialisent et peuvent parcourir toute l'europe pour ouvrir des comptes et de fausses sociétés. D'après l'autorité des marchés financiers, les arnaques aux placements en ligne représentent pour les particuliers des pertes évaluées à 500 millions d'euros par an.

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