
Le départ de Mme Nebghouha Mint Mohamed Vall, ex-Ministre de l’Education Nationale et son remplacement par Mohamed Ould Amar, intervient à un moment où l’école mauritanienne connaît une crise qui ne remonte pas d’aujourd’hui, mais est consécutive aux mauvais choix politiques ayant secrété de multiples réformes d’un système qui n’arrive pas à s’arrimer sur un enseignement moderne lavé de tout contenu idéologique.
Les dernières tentatives de revalorisation du système éducatif mauritanien, loin de donner les résultats escomptés, n’ont fait que détériorer le niveau des apprentissages. Les conséquences : baisse de la qualité, dépréciation du niveau des élèves et du corps enseignant…L’arrivée de Nebghouha Mint Mohamed Vall fut quoi qu’on le dise et malgré le débrayage des enseignants, un tournant "historique" dans la mise en chantier d’un vaste programme de refondation de l’école mauritanienne.
La ministre a d’une main de fer, jeté les jalons de ce qui doit nécessairement sortir l’école mauritanienne de sa léthargie. La première action d’envergure menée par Nebghouha fut de mettre un terme à la pagaille qui régnait au sein des écoles où le taux des désertions du corps enseignant avait atteint des proportions inimaginables. Le laxisme, le favoritisme, le clientélisme, les recrutements massifs et arbitraires ont été la cible du combat de Mme la Ministre.
Pour la première fois dans l’histoire de l’école mauritanienne, on a assisté à une rentrée scolaire normale. Toutes les dispositions utiles ont été prises au plan matériel, didactique et humain pour assurer une bonne année scolaire. Pour une fois, les affections ont été faites suivant des critères objectifs. De même que le recrutement des Iden et des Dren. Les efforts de la Ministre ont également porté sur la revalorisation de la situation et du statut de l’enseignant.
La prime de craie a été revue à la hausse, de même que les indemnités de direction pour les instituteurs. Les syndicats de l’enseignement, qui n’avaient jamais été associés aux décisions de la tutelle, ont été reconnus par la Ministre qui a engagé plusieurs consultations sans parvenir à trouver un terrain d'entente.
La Ministre tentait d’user de son autorité pour aplanir les divergences en multipliant les appels sans céder à la pression. Son entourage immédiat, au lieu de privilégier le langage de la persuasion prodiguait des conseils déraisonnables.
Au fur et à mesure, la voie de la confrontation éloignait toute chance d’une recherche de solution consensuelle. Les responsables du Ministère jouaient la carte de la sanction à l’encontre des grévistes. Les laboratoires de la mesquinerie, du persiflage renaissaient de leurs cendres et les responsables du Sipes mettaient à profit cette situation pour conforter leurs positions syndicales, aidés en cela par des politiciens connus par leurs accointances avec leurs amis syndiqués.
Après avoir résisté au premier remaniement, Nebghouha essaye de renouer avec le dialogue, en vain. Le temps des examens de fin d’année raviva les tensions. Le bras de fer fut gagné par la Ministre. Les compositions de fin d’année, le Bepc, le Bac ont été organisés sans aucune difficulté.
La fin du mois de juin a été dure pour les grévistes. Des ponctions salariales sur les soldes déjà maigres des enseignants accentuent les frustrations. Les grévistes jurent de continuer la lutte dés la rentrée prochaine jusqu’à la satisfaction de leurs revendications. C’est sans compter avec l’inflexibilité d’une femme qui croit à sa mission.
Hélas, dans la solitude, il est difficile de triompher. Nebghouha allait quitter son portefeuille à la faveur d’une autre crise beaucoup plus profonde, consécutive à la fronde des députés. Elle est partie après avoir posé les jalons de la reconstruction de l’école mauritanienne.
L’arrivée de Ould Amar
L’arrivée de Ould Mohamed Ould Amar à la tête du Ministère de l’Education Nationale fut aussi une autre opportunité pour l’école mauritanienne. A l’instar de son prédécesseur, Ould Amar ne manque pas d’ambitions pour poursuivre l’œuvre de reconstruction entamée par Nebghouha.
Ancien professeur d’université, démocrate jusqu’à la moelle, pour avoir évolué dans un milieu multiculturel loin des niaiseries extrémistes, Ould Amar a dirigé pendant quelques années l’Ecole Normale Supérieure de Nouakchott. Homme d’ouverture, de dialogue, connu pour sa droiture et sa responsabilité, le jeune universitaire sait bien sur quel fauteuil il est assis.
Mais son expérience est aussi grande pour assumer cette lourde mission qui l’attend. Son passage éphémère à la tête du Ministère de la Culture et de la Communication avait été interprété comme une volonté affichée du Président de restructurer le secteur.
Maintenant qu’il est destiné à l’éducation nationale, sa venue consacrera la reprise des négociations avec les syndicats et les parents d’élèves.
Loin de donner un coup de pied sur ce qui avait été édifié par son prédécesseur, Ould Amar s’emploiera à poursuivre et à consolider le travail titanesque déjà abattu par Nebghouha. Pour ce faire, il a engagé une série de contacts avec les responsables syndicaux en vue de trouver une voie de sortie de crise.
Le nouveau ministre a aussitôt procédé à l’annulation de la procédure de suspension qui allait s’appliquer sur les grévistes à la fin du mois en cours. Tout porte à croire que le remplaçant de Nebghouha tiendra le coup dans un département où… tous les coups sont permis.
Cheikh Tidiane Dia
Cridem via "Le Renovateur Quotidien" (-La Loupe du Rénovateur:)